Jeune artiste talentueux, élève du Conservatoire de Brest, celui qui se qualifiait lui-même " d'enfant supranaturel de Charles Trenet et de Bob Dylan " disparut tragiquement dans un accident de voiture, à l'aube de ses trente cinq ans. Si son répertoire, écolo et fleur au fusil, fut parfois jugé mièvre ou trop tendre, il laisse derrière lui de grands titres de la chanson, comme Ma petite fille de rêve, Ile, ou Ma Bretagne quand elle pleut. Un chanteur généreux et fragile, qui malgré son départ prématuré, a acquis un public fidèle et nombreux.




Ma Bretagne quand elle pleut

Né à Morlaix, Finistère, le 20 septembre 1946, Jean-Michel Caradec passe sa jeunesse à Locquenolé, puis à Brest, avec ses parents. Issu d'une culture bretonne et d'une éducation solide (son père est marin, sa mère institutrice), il obtient un premier prix au Conservatoire de Brest, où il se distingue à la flûte traversière. Parallèlement, muni de sa guitare, offerte à seize ans par sa grande sœur, il fait le tour de sa Bretagne, s'essayent sur scène avec ses premières compositions. Sa passion de la musique ne l'empêche pas d'être un élève émérite : Bac Philo, Lycée Henri IV à Paris,… et projet de Normale Sup !

Mai 68

Mais son ambition professionnelle s'arrête sur les pavés de Mai 68. Le vent de révolte qui souffle sur la jeunesse française emporte Jean-Michel à Brest. Fini Normale Sup, il sera chanteur. Tout va alors très vite. Dès 1969, Jean-Michel signe son premier contrat chez Polydor puis enregistre plusieurs 45 tours. En 1972, il sort son premier album, mais c'est deux ans plus tard que Caradec connaît le succès avec Ma petite fille de rêve.

Une notoriété méritée

Ce premier titre va imposer au public un jeune chanteur complet (il écrit et compose lui-même), généreux et discret. Sans tomber dans le star-system, Jean-Michel se produit à l'Olympia dès 1976, et tourne avec Le Forestier, Brassens ou Serge Lama, grands artistes desquels il assure la première partie. Altruiste, il n'hésite pas non plus à encourager un autre chanteur débutant, un certain Didier Barbelivien, et à lui mettre le pied à l'étrier. Ce dernier est aujourd'hui un des plus grands auteurs de la chanson contemporaine. De même, Francis Cabrel reconnaîtra, à ses débuts, avoir été beaucoup influencé par le style de Caradec. On retrouve en effet chez le chanteur de Petite Marie, de La dame de Haute-Savoie ou de Je l'aime à mourir, la même candeur romantique et les mêmes préoccupations (écologie, famille, amour, rejet de l'argent et de la société mercantile,…).

Un artiste polyvalent

Malgré une production discographique intense, Jean-Michel trouve encore le temps de s'occuper de lui, de sa famille (il a une fille et un fils), et de ses amis. Entre une partie de pêche avec son père et un match de foot, il endosse la veste du producteur grâce à sa maison d'éditions Madeline Songs. Cependant, et ce malgré quelques succès indéniables (Ile, La ballade de Mc Donald, Portsall,…), le public n'apprécie pas le chanteur à sa juste valeur. On voit trop en lui un artiste léger, mièvre, sans considérer la véritable poésie de ses textes ni la qualité de ses compostions riches et originales.

Un destin brisé

Il faut malheureusement attendre sa mort, en 1981 (deux mois avant Brassens !), pour que le nom de Jean-Michel Caradec soit enfin associé aux grands noms de la chanson française. Ce 29 juillet 1981, alors que Jean-Michel rejoint la tournée France Inter à Tours, sa voiture s'encastre sous un camion aux alentours de Rambouillet. Le chanteur sera enterré au cimetière de Recouvrance à Brest. La chanson perd prématurément un grand artiste, sensible et intelligent, fidèle à ses convictions : nature, humanisme, poésie, liberté, des idéaux forts que l'on retrouve dans les huit albums qu'il nous a légués.


[ Petit Dictionnaire Intime de la Chanson Française ]